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Instinct Animal
30 mai 2014

Chapitre 8 - dernière partie

**

Quand Naru et Mimiko arrivèrent au balcon, elles eurent le temps de voir un loup sortir d’une poubelle renversée d’un pas hésitant.

-Oh… Bordel !

-Nom d’un chien ! Approuva Naru alors que la louve s’ébrouait. Elle a sauté !

-Et elle est sous sa forme animale ! Elle croit faire quoi là ? Bon sang… ! Ce n’est pas comme si elle pouvait…

-SUJET TABOU N°1 !!! Piailla Naru avant que Mimiko ait pût finir sa phrase. JE NE VEUX PAS SAVOIR !!!!

-Oui ! Bon ! J’imagine qu’on a plus qu’à la ramener avant qu’elle ne fasse une bêtise ! Je vais la pister par le haut, toi…

-Je la suis par le bas et j’appelle Kyogané !

-Je doute qu’il puisse énormément nous aider tu sais, grogna Mimiko avant de s’agripper au garde corps pour sauter d’un bond puissant sur celui qui leur faisait face.

Elle entendit à peine la réponse de Naru alors que celle-ci rentrait dans l’appartement pour descendre :

-On ne sait jamais.

La brune n’eut aucun mal à rejoindre le toit. Ses escapades nocturnes l’avait familiarisée avec ce bâtiment et ceux alentours.

Elle suivit donc la louve sans difficulté au début et garda un œil sur Naru qui courrait derrière elle.

-Quelle plaie… Maugréa-t-elle avant de sauter sur un nouveau toit.

Naru avait sans nul doute raison. Elles courraient tout droit à la catastrophe en se contentant de rester en groupuscule plus ou moins lié afin de satisfaire les exigences de liberté de chacun et la situation leur échappait peu à peu des mains.

Mais au fond d’elle, oh, ça ne lui plaisait pas du tout… Elle ne voyait personne convenir… Personne en qui elle aurait assez d’estime pour lui offrir le droit de jouer sur son libre arbitre.

/Il faudra nous battre pour prétendre à un tel pouvoir…/ Grogna une voix au fond d’elle et pour une fois, elle était totalement d’accord.

Obligée de descendre pour traverser le canal, elle fit un détour qui lui permit de ne pas être trop remarquée des passants et voiture, passant sous le pont, plutôt que dessus. Bondissant de pieds en pieds de l’architecture en pierre, avant de remonter vers son terrain de prédilection. Un instant elle crut avoir perdu Arisa, mais elle repéra Naru et tâcha de rattraper son retard.

Arisa semblait foncer dans la foule sans schéma précis, d’ailleurs il lui sembla vite aux coups d’œil effrénés à chaque croisement qu’elle semblait perdue.

*Eh oui Risa, on n’a pas la même perception du monde qui nous entoure sous forme animale…* Soupira intérieurement Mimiko qui en avait déjà fait l’expérience. 

Ainsi elle fit ce que tout animal perdu ferait : elle chercha la verdure pour pouvoir se cacher.

Son chemin les conduisit toutes trois au jardin de Compans Caffarelli. Une fine pluie se mit alors à tomber comme pour tout arranger.

Mimiko se laissa tomber de la pagode du jardin japonais prés de Naru, causant son sursaut. Elle la foudroya du regard en portant une main à son cœur :

-Ca t’amuse de me faire peur avec tes acrobaties ?

-Bon, pour l’instant aucun homme ne lui a sauté dessus, ce qui répond peut être à ta question tabou.

-Merci de ramener ça sur le plateau…

-C’est toi qui dit toujours qu’il faut qu’on en sache le plus possible sur nous !

-Il y a quand même des choses que je ne veux pas savoir… Marmonna Naru en continuant à chercher la louve.

-Oui mais s’il nous suffisait d’être sous forme animale pendant cette période pour ne pas…?

-Les hommes, oui ! Peut être ! Mais que fais tu des autres changeurs… ET PIRE, à supposer que ce soit pire, je n’en ai aucune idée : des animaux ?!?

-Ah… Oui… Ok, je me tais. C’est toi la scientifique… Moi je vais me contenter d’être une future L. J’ai d’horribles images dans la tête maintenant…

-C’est ta faute, tu n’avais qu’à pas en parler !

A se disputer, elles avaient évidemment perdu la trace de leur consœur animale. Mimiko fixait la grisaille entre les gouttes d’eau, tandis que Naru levait son nez en l’air à la recherche de l’odeur d’Arisa.

La pluie était en train d’effacer la piste. Faisant plus confiance aux capacités de Naru, Mimiko suivit la jeune fille qui slalomait d’un courant d’odeur à un autre. Ce fut cependant un bruit de poubelles renversées qui les fit se diriger vers Arisa.

Deux jeunes qui avaient apparemment abusés de la boisson l’entouraient, l’obligeant à se retrancher derrière deux grandes poubelles. Ils jetèrent l’une de leur bouteille vide dans sa direction et la louve se rencogna un peu plus derrière son abri de fortune. Un petit couinement de douleur suivit quand la bouteille explosa sur le mur et qu’un débris de verre vint se planter dans son museau.

-Raah loupé…

-Attends, et si c’était un chien en fait ?

-Non, j’te jure, mon frère en élève, ç’pas un chien ça, c’est un loup !

-ARRETEZ CA DE SUITE !!! S’exclama Mimiko en s’approchant à grands pas des deux hommes. C’est mon chien !

Elle regretta sur le moment de ne pas avoir pensé à prendre un des colliers et des laisses que gardait Naru. Cette dernière vint la rejoindre, pas rassurée, et essaya aussi de faire face. Bien que deux adolescentes à moitié trempée par la pluie ne devaient pas sembler être une menace suffisante pour ces deux escogriffes.

Pour Mimiko, même s’ils étaient des humains, ils n’étaient guère différents des deux chiens enragés qui les avait attaqués, Arisa et elle, cet hiver. 

-Heiiiiinnn ??? Fit le plus grand d’un ton pas très intelligent mais avec un regard et une attitude menaçante.

-C’est mon chien, je vous interdis de le brutaliser, continua Mimiko tout en le défiant du regard du haut de ses deux têtes de moins.

-On… On va appeler la police ! Glapit Naru en s’agrippant à la brune.  

-Ouais vas-y, appelle la police pétasse, et on verra si cette bête est pas un loup !  

Naru grimaça et sentit un grognement résonner dans la cage thoracique de son amie. Elle l’attrapa au niveau des épaules et lui chuchota :

- Calme-toi ! Ce sont des humains, on ne peut pas leur faire de mal !

-Parce que tu crois qu’ils nous en feront pas… Marmonna Mimiko a la limite de l’audible tellement sa gorge grondait déjà.

-Tu as déjà tué deux hommes, tu te rappelles ????

Le rappel de ce fameux jour suffit à faire revenir Mimiko aux commandes. Le grondement se calma et elle se détendit légèrement.

-Désolé… Mais Arisa est blessée…

La louve passa à nouveau la tête en dehors de son abri et les implora du regard de l’aider. Des gouttes de sang tombaient de son museau là où le morceau de verre était encore fiché.

-Je vous assure que ce n’est pas un loup, elle ressemble à un loup, mais en fait c’est un mélange de euh… Husky et de berger allemand ! Improvisa Naru.

L’homme plissa des yeux en les regardant, s’apprêta à dire quelque chose, puis leva les yeux, comme son compagnon, sur quelque chose qui se trouvait bien au dessus d’elles, l’air éberlué.

Mimiko et Naru qui n’avaient rien senties de particulier, se retournèrent et firent machinalement quelques pas en arrière.

-Oh putain ! S’exclama l’un des jeunes hommes alors que se dressaient devant eux, grand d’au moins 4m et aussi massif qu’un camion, un éléphant aux courtes défenses pointées, juste légèrement recourbée, sur eux.

Ne pas avoir senti ou entendu un animal aussi gigantesque était aberrant pour les deux changeuses, mais elles comprirent vite que c’était parce qu’il ne leur était pas hostile, bien au contraire.

-Ky… Kyogané… Balbutia Naru alors qu’elles s’écartaient du passage.

-Bein ça alors… Asu va regretter de ne pas avoir été là… Lacha Mimiko en le regardant passer pesamment devant elles.

Kyogané les salua en éventant ses grandes oreilles, puis s’avança jusqu’aux deux garçons et attrapa le plus menaçant avec sa trompe pour le secouer un peu et le lancer plus loin.

Le jeune homme fit une parabole en criant d’horreur et son copain n’attendit même pas de savoir ce qu’il était devenu avant de se carapater en hurlant.

Arisa sortit timidement la tête de son abri, avant de trotter vers eux alors que Kyogané reprenait forme humaine.

Mimiko et Naru, un peu choquée par ce qui venait de se passer, ne pensèrent à se retourner qu’une demi-minute trop tard. Elles se jetèrent un regard embarrassée mais éloquent. Joliment foutu leur médecin : il cachait bien son jeu avec sa blouse de médecin et ses vêtements amples.

-Naru, j’ai laissé mes vêtements derrière le grand arbre, déclara t’il d’un ton un peu voilé en s’éloignant d’Arisa qui semblait avoir perdu toute notion de gène ou de pudeur avec son état et qui se frottait à lui.

*Heureusement qu’elle est sous forme animal…* Songea Mimiko en regardant le spectacle du coin de l’œil.

Naru revint avec les vêtements quelle lui passa tout en tenant son regard fixé ailleurs et attrapa par la même occasion Arisa par le cou pour la tirer avec elle.

-Tu devrais avoir honte… Maugréa-t-elle à la louve alors que Mimiko venait l’aider.

-On devrait partir d’ici, non ? Ces types vont probablement rameuter des policiers ? S’inquiéta la brune.

-Hum… Vu leur état d’ébriété, commença Kyogané en fermant le dernier bouton de sa chemise, il est fort possible qu’ils finissent en cellule de dégrisement s’ils affirment avoir vu un éléphant en plein Toulouse.

-Pas faux.

-Merci d’être venu nous aider, fit Naru avec ce que Mimiko pourrait qualifier d’un certain ton d’adoration dans la voix.

*Hum hum, Asu avait pas tord…*

La chienne évita de peu de se faire morde par Arisa qui voyait mal cette appropriation intempestive d’un de SES mâles.

-Ce n’est rien. Mais à ce que je vois, même les arrangements que nous avons pris ne suffisent pas à garder la situation sous contrôle…

Il s’était retourné tout en enfilant ses chaussettes et ses chaussures. C’était assez étrange comme scène. On ne voyait pas son médecin faire ce genre de choses, un médecin c’était plus une sorte d’entité immuable. Sauf que là, il se montrait aussi à l’aise que s’il était au milieu de sa famille.

-Arisa a sauté du balcon… Du troisième étage ! 

-Sous forme de loup ?

Arisa émit un grognement satisfait, comme si elle cranait de son exploit.

-Et elle est blessée… Continua Mimiko en observant son museau suintant d’hémoglobine.

-Alors d’abord, il vaut mieux qu’elle reste sous cette forme, car la transformation tirerait sur les blessures et sur les muscles qu’elle aurait pût se fouler en tombant, commença Kyogané en chaussant ses lunettes. Croyez moi si je vous dis que ça fait TRES mal de se transformer avec un os cassé ou un muscle déchiré.

-Vous allez la soigner ?

-Malheureusement, il vaut mieux que j’évite de m’approcher d’elle. Même si je ne suis pas des masses dominant, je ne suis pas immunisé à ses phéromones. Il faudra lui retirer le morceau de verre à l’aide d’une pince et désinfecter en tamponnant doucement la blessure avec du coton et de la Bétadine. Tu pourras le faire Naru ?

-Oui ! Bien sur ! Affirma cette dernière.

Avec un ton qui affirmait qu’il aurait pût lui demander n’importe quoi. Mimiko balança la tête et leva les yeux au ciel d’un air désespéré, mais Naru fut récompensée d’un sourire.  

Arisa quant à elle, grogna quelque chose qui aurait pût ressembler à une insulte.  

***

-LAISSSEEEZZZZZ MOIIIII MOOOOUUUURRRRRIIIIRRRR !!!!!!!!! Hurla une voix depuis le troisième étage d’une jolie résidence au bord du canal.

C’était enfin le dimanche soir et Mimiko, Asuka et Naru avaient vu au cours de la journée le taux de phéromones baisser, baisser… jusqu’à ça.

Arisa s’était enfermée dans la salle de bain, avait reprit sa forme humaine et gémissait son désespoir et sa fierté blessée.

-Bon ça va, pas la peine d’en faire un flan, puisqu’on te dit que tu n’as rien fait d’irréparable ! Grommela Asuka derrière la porte.

-JE SAIS TRES BIEN CE QUE J’AI FAIT ! J’M’EN SOUVIENS FIGURE TOI !!!! RAAAH !!! JE POURRAIS PLUS JAMAIS METTRE LES PIEDS AU LYCEE !!!!

Asuka se retourna et poussa un soupir en haussant des épaules.

Mimiko était couchée sur le divan dont on avait changé la housse et bailla, complètement crevée d’avoir dû utiliser son influence sur Arisa pendant les 3 derniers jours. Naru quant à elle était toute joyeuse aux fourneaux, avec des faux airs de jeunes mariées qui foutaient la frousse à tout le monde.

Asuka vint se laisser tomber à côté de Mimiko qui replia ses jambes.

-Elle a pas vraiment tord, comment on va expliquer ça au lycée ? Et à Isa et Shin qui nous font presque la gueule à cause de ce qui est arrivé ?

-Ah oui, carrément ?

-Yep, elles nous saluent du bout des lèvres et nous regardent en murmurant quand on croit qu’on les voit pas… Je comprends qu’elles se sentent mise à l’écart, mais qu’est ce qu’on peut y faire ? Tout leur dire ?

Le signe de dénégation n’était même pas utile tellement il était évident que Shin et Isa mettant leurs mignons petits nez dans leurs affaires de changeurs c’était comme rajouter un agent hautement volatil et explosif dans une solution déjà pas très stable.  

-Pour le lycée, je pense que vous pourrez expliquer l’étrange état d’Arisa par la maladie. Ca devrait passer. TU ENTENDS ARISA ? CA DEVRAIT TE SOULAGER ?

-MOUAIS, C’EST CA !

Pas du touuuut ironique, et avec quelques trémolos qui semblaient indiquer qu’elle était en train de pleurer. Mimiko et Asuka se jetèrent un regard d’impuissance. Comment pouvaient-elles donc consoler leur amie ?

La sonnette retentit soudain dans l’appartement et Asuka bondit du canapé pour aller ouvrir aux convives qui étaient attendus.

Kyogané et Alec entrèrent, ce dernier avec sa valise et bien content de retrouver son chez lui.

-Bonsoir vous deux ! On attendait plus que vous !

Kyogané salua les filles d’un hochement de tête avant de s’inquiéter immédiatement pour Arisa :

-Elle va bien ? Sa blessure s’est bien refermée ?   

-Du peu qu’on en a vu, oui. Elle est dans la salle de bain, ajouta Asuka en pointant son pouce derrière elle.

-Hum, ça sent bon, affirma Alec en se dirigeant vers la cuisine.

-Lasagnes maison, annonça Naru.

-Donc avec pleins de trucs en plus et que j’aime pas, précisa Mimiko depuis son canapé.

Alec se retourna vers elle et avec un sourire chaleureux, vint s’asseoir près d’elle avant de lui servir de coussin :

-Fatiguée ? Demanda-t-il d’un ton mi moqueur, mi affectueux.

-Ouiiiii !!!

-Oh pauvre chérie.

Asuka essaya de ne pas faire attention à eux mais la voix d’Alec était difficile à ignorer (en fait, Alec dans sa globalité était difficile à ignorer), surtout quand elle avait cette tessiture soyeuse qui avait de quoi mettre à l’envers l’estomac de la plupart des filles. Elle ne pût s’empêcher de rougir et elle qui n’avait ni frère ni sœur, était incapable de savoir si ce genre de scène était normale.

En tout cas ça lui semblait vachement intime. 

Elle se força à se porter vers Kyogané qui parlementait avec la porte de la salle de bain tout en priant pour que personne n’ait remarqué son trouble et en se traitant de toutes les appellations fleuries qu’elle connaissait.

-Alors ? Des résultats positifs ?

-La situation est inédite, regretta Kyogané en se frottant les cheveux. Et je ne crois pas être spécialement bien placé pour rassurer et conseiller une adolescente, mais… Hum. Laisse-moi quelques minutes.

Le visage du médecin passa de l’embarras à la détermination et Asuka, déjà un peu surprise d’être tutoyée, hocha la tête et revint vers le salon.  

Elle entendit la porte de la salle de bain s’ouvrir et Kyogané rentrer à l’intérieur. Ils ne pouvaient qu’espérer qu’il trouverait les mots pour soulager Arisa.

En attendant elle mit la table avec Alec, une nouvelle chose assez irréaliste, bien qu’elle cachait ce sentiment en faisant le pitre.

Tout ça était si fou. Tous les six dans cet appartement. Quand il n’y avait que les filles, elle pouvait se dire qu’elles étaient entre amies, mais la présence de Kyogané et d’Alec donnait une toute autre impression.

Une impression d’étonnement, un peu de gène, mais aussi, pas mal de chaleur.

Elle pourrait s’habituer à voir Alec lui parler et lui sourire comme s’ils étaient amis depuis des lustres, de sentir Kyogané pas loin et près à guérir le moindre de ses bobos. Oui, elle pourrait s’y habituer avec plaisir.

*C’est ça, la meute ?* Se demanda t’elle en finissant de poser les verres.

Elle se souvint alors de ce que lui avait dit Kyogané quand elle s’était réveillée après avoir été contaminée :

« -Ca, c’est peut être terminé mais… Le cauchemar est juste en train de commencer, n’est ce pas ?

-Ca dépend, regarde-les, il semble qu’il n’y ait pas que des inconvénients. »

Oui, malgré les galères qui leur tombaient quotidiennement sur la tête, il y avait aussi beaucoup de joie et de bonheur.

Quand Naru vint poser le plat de lasagne au milieu de la table, que Mimiko le regarda avec suspicion alors qu’Alec lui cachait les yeux pour l’empêcher de faire la fine bouche, Arisa arriva timidement du couloir avec Kyogané et s’assit à côté d’elle, ce dernier affirma que ce n’était plus la peine de parler de ce qui s’était passé tout en prenant place, et alors tout le monde se servit et l’univers autour d’Asuka sembla soudain à nouveau à sa place.

 

A suivre… 

harmonie du soir de asdom

 

photo (c) Asdom

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